Interview : Ivo Provoost, “Artiste plasticien”

  • Pourriez-vous m’expliquer votre métier ? 

Je suis un artiste plasticien. Je fais partie du duo “Denicolai & Provoost”. Je travaille dans ce duo depuis 23 ans. Je suis artiste dans le champ de l’art contemporain donc j’expose mes œuvres d’art dans les musées, les galeries, les biennales d’art, …”

 

  • Dessinez-vous depuis longtemps ?

“Oui, depuis que je suis tout petit. En fait quand j’avais 2 ans et demi j’ai eu le syndrome de Guillain Barré. C’est une maladie où petit à petit on est paralysé donc ça commence par les jambes et après ça peut se propager dans les bras et le visage. J’étais à l’hôpital et j’ai beaucoup dessiné. Il y a encore chez mes parents des dessins avec, par exemple, un train avec des pieds au lieu des roues… et un autre dessin d’un soleil : au lieu d’avoir des rayons; j’ai dessiné des jambes avec des pieds. C’est très clairement l’expression d’un désire de vouloir marcher ou quelque chose du genre. Mais sinon j’ai toujours dessiné. »

 

  • Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire ce métier ?

“C’est encore différent de faire ça pour s’amuser, comme un hobby: “allez hop une petite peinture le dimanche !” ou de dire: “non moi je veux faire ça tout le temps”. Professionnellement pour moi c’était quelque part en moi, je n’ai pas vraiment le choix parce que c’est la chose que je sais le mieux faire donc le choix est assez évident. Ce que j’aime bien avec le fait d’être artiste c’est que tu es obligé de regarder le monde d’une autre façon que les autres personnes, sans vouloir être prétentieux, mais les artistes regardent mieux qu’ un footballeur,… Les artistes sont des gens qui regardent beaucoup plus intensément les choses et ça j’aime bien vivre comme ça .”

 

  • Quel est votre style d’art ? 

Je fais une pratique pluridisciplinaire, donc pas spécialisée dans une méthode ou une technique et je me permet d’utiliser tout ce que je veux : donc par exemple le son, collaborer avec des architectes, des projets de dessin, des projets d’édition, projets de livre, dessins animés, de tout .

C’est toujours différent, il y a des artistes qui aiment bien être reconnaissable donc ils développent un style et puis comme ça, par rapport au marché, on les reconnaît plus facilement et ça a aussi beaucoup de succès. C’est pour ça que certains artistes sont obligés de répéter la même chose parce que ça rapporte de l’argent et ils sont un peu emprisonnés dans leur propre système et moi j’aime bien être un artiste qui change tout le temps comme un caméléon donc selon le contexte avec lequel je vais travailler, le travail va s’adapter, va donc changer de couleur, va changer de langage plastique par apport au contexte spécifique donc ça change tout le temps et on ne sait pas dire “Ah, c’est typiquement Denicolai & Provoost”. Après quand on étudie le mécanisme on est un peu moins surpris de comment tout d’un coup il font des gâteaux,…

copyright Denicolai & Provoost

Arrêts sur image du dessin animé HELLO, ARE WE IN THE SHOW ?

 

  • Comment avez-vous réussi à intégrer des galeries ?

“J’ai travaillé en tout avec 4-5 galeries différentes et pendant très longtemps je refusais de travailler avec les galeries. Au début c’était de petites galeries avec des gens de plus ou moins mon âge qui se lançaient en même temps que nous donc en tant qu’artiste et c’était peut-être pas réfléchi mais c’était bien parce que ça nous a permis de définir certaines chose par rapport au commerce et où on voulait se positionner, mais c’était encore un peu naïf. Et puis toutes sortes de circonstances, la première collaboration s’est arrêtée alors que c’était une très chouette histoire : c’était avec un gars italien Paolo Boselli, je suis toujours en contact avec lui, c’est resté un ami. Et puis on a toujours travaillé avec d’autres galeries toujours un peu à l’échelle belge; jamais des histoires de dingue et puis on a arrêté de travailler avec des galeries on en avait marre, on cherchait une liberté par rapport au commerce. Notre but c’était de placer les œuvres dans des collections publiques on aime pas trop l’idée que ça rentre dans les collections privées. Donc on aime bien l’idée que se soit validé par des curateurs, par des professionnels,… que ce n’est pas juste une histoire de goût personnel et en plus quand c’est dans des collections publique c’est que le travail reste accessible pour tout le monde et ça, c’est très important pour nous.”

 

  • Combien de temps avez-vous besoin pour faire une œuvre d’art?

“Ça change beaucoup d’un projet à un autre, parce que parfois il y a des choses qui se font en une journée donc plutôt ce qui est de l’ordre de dessins, de maquettes, de petites choses comme ça. Mais il y a des projets qui durent longtemps à préparer, par exemple : on a terminé un dessin animé qu’on avait mis en route en 2009 et on l’a terminé en 2020 mais ça ne veut pas dire qu’on a travaillé tout le temps dessus. C’est un processus, mais il y avait des périodes où ce projet était mis en attente, donc entre temps on travaillait sur d’autres choses. Après on a eu de l’aide donc une équipe de 10 animateurs, une autre équipe en Israël qui faisaient douze images par seconde et puis il y avait des gens qui faisaient le décor,…  L’importance c’est de toujours avoir 4-5 projets en route pour être sûr de ne pas perdre le fil.”

copyright  Denicolai & Provoost

Dessin d’étude pour l’organisation de la salle pour montrer le dessin animé dans le cadre de l’exposition au S.M.AK. à Gand.

 

  • Qu’avez-vous fait comme études ?

“J’en ai fait, mais il y a beaucoup d’artistes qui n’ont pas fait d’étude artistique. Mais moi, j’ai fait des études à La Cambre ici à Bruxelles. C’était à l’Atelier Espace Urbain et Ruraux et donc c’était une pratique artistique plutôt contextuelle fort en liaison avec l’espace urbain ou avec l’espace naturel,… mais fort en lien avec l’architecture et l’urbanisme. Et j’ai fait 5 ans d’étude, après j’ai encore fait un post-diplôme en France. C’était un peu une sorte de bourse, en fait, c’était encore lié à une école, à l’Ecole des Beaux Arts en France. J’étais déjà en train de faire la pratique artistique autonome, mais j’étais encore lié à une école, donc j’avais plus ou moins un soutien. Maintenant j’enseigne dans une école d’art supérieur. »

 

  • Quelle est votre source d’inspiration ?

Elle vient  de ce que je vois, de ma vie, du monde qui m’entoure, des choses directes autour de moi. 

Par exemple pour notre dessin animé ce n’est pas comme les dessins animés de Disney et autres. Il n’y a pas cette magie. Notre dessin animé, il réduit au fait réel ce qu’on peut voir dans la vie réelle. 

 

  • Que donneriez-vous comme conseil pour des jeunes qui aiment faire de l’art ? 

Moi je dis continuez, c’est magnifique ! 

Victoria